Les ONG jouent un rôle important dans le développement social du monde

17. Nov 2025 | actualité, contribution externe

L’ONU a organisé le deuxième Sommet social mondial début novembre à Doha (Qatar). Le directeur de Caritas Suisse, Peter Lack, faisait partie de la délégation officielle suisse en tant que représentant de la société civile. Nous l’avons interrogé sur ses conclusions.

Quelle a été l’importance de ce Sommet social mondial de l’ONU ?
En 1995, le premier Sommet social mondial de l’ONU a adopté la Déclaration de Copenhague, qui a fait date. Elle a placé le développement social au cœur des préoccupations de la communauté internationale. Bien que des résultats remarquables aient été obtenus ces 30 dernières années dans la réduction de la pauvreté, force est de constater que quelque 817 millions de personnes vivent toujours dans la misère. La croissance économique ne suffit pas à instaurer la justice sociale, comme cela a été relevé à maintes reprises. Le Sommet social mondial remet cette perspective sur le devant de la scène. Dans son allocution, la présidente de l’Assemblée générale de l’ONU Annalena Baerbock a souligné le rôle crucial de cette conférence dans la dernière étape de la construction de sociétés résilientes et capables de surmonter les divisions sociales.

Vous avez représenté la société civile au sein de la délégation suisse. Quel rôle ont joué les organisations non gouvernementales (ONG) lors de cette conférence ?
La présence des ONG était bien visible lors du Forum de la Société civile. Les représentant∙e∙s des gouvernements ont largement confirmé l’importance des organisations de la société civile, notamment pour ce qui est de trouver de bonnes solutions politiques et pour contribuer à les concrétiser. Je me suis demandé si c’étaient seulement de belles paroles ou si elles allaient être suivies d’actes, c’est-à-dire si les organisations de la société civile allaient vraiment s’asseoir à la table des négociations et si leur voix serait prise au sérieux. Par chance, certains intervenant∙e∙s sur le podium ont justement débattu de ce point. Il en est clairement ressorti que le développement social doit être centré sur les besoins des personnes. Et qu’il faut relier le mondial au local. En tant qu’ONG, nous avons un accès direct aux groupes défavorisés et nous faisons entendre leurs voix.

Comment passer des belles paroles à la pratique ?
Il faut que les gouvernements du monde entier s’engagent fermement à laisser une place aux organisations de la société civile et qu’ils collaborent avec nous. Les ONG ont très largement contribué aux succès obtenus ces 30 dernières années dans la lutte contre la pauvreté. Leur rôle a sans cesse été relevé. La Déclaration de Doha adoptée lors du sommet réaffirme la nécessité de faire entendre la voix des ONG et l’importance de leur rôle.

Comment la Suisse s’est-elle positionnée lors de ce sommet ?
Il est très regrettable que la Suisse n’ait délégué aucun membre du Conseil fédéral au Sommet social mondial. Ce n’est malheureusement pas un bon signe. J’ai trouvé remarquable le discours de la cheffe de la délégation suisse, l’ambassadrice Valérie Berset Bircher du Secrétariat d’État à l’économie SECO. Elle a déclaré que si l’on pouvait se féliciter des succès obtenus depuis le premier Sommet social mondial de Copenhague en 1995, il fallait également être honnête et reconnaître les manquements. Elle a par ailleurs souligné que le multilatéralisme est en crise. Or, l’action collective est primordiale pour vaincre la pauvreté. La déclaration adoptée lors du sommet doit, selon Valérie Berset Bircher, lui redonner un nouvel élan.

Comment s’est déroulé l’échange au sein de la délégation suisse ?
L’échange a été riche et constructif. Les discussions avec les autres représentant-e-s de la délégation suisse m’ont démontré qu’il s’agit d’un travail commun impliquant aussi bien le gouvernement, l’économie privée et les ONG. Nous partageons de nombreux objectifs et nous pouvons nous compléter. J’ai confiance en cette complémentarité. La Suisse non plus n’est pas encore aussi avancée qu’elle le devrait en matière de développement social et d’éradication de la pauvreté. Et elle ne peut pas simplement se retirer lorsqu’il en va de la solidarité internationale envers les pays plus pauvres.

Qu’est-ce qui vous a particulièrement frappé ?
La question de la numérisation a été très présente lors de ce sommet. Le défi consiste à éviter la création de nouveaux clivages : entre les pays du Nord et du Sud comme entre les hommes et les femmes. La technologie offre d’énormes chances de développement social, mais elle peut aussi renforcer et perpétuer les inégalités. Globalement, nous devons être très conscients que tout le monde ne peut pas tirer profit de la numérisation.

Qu’est-ce qui vous donne à réfléchir ?
Ces derniers jours, on a souligné à maintes reprises l’importance des ONG. Pourtant, on a aussi reconnu que beaucoup d’entre elles luttent pour subsister et doivent s’affirmer. La contribution qu’elles apportent n’est pas assez visible. Les ONG ne sont pas toujours appréciées, car elles attirent aussi l’attention sur des aspects désagréables. C’est pourquoi il y a parfois une remise en question de leur existence ou une présentation distordue de leurs actions et de leurs motivations. Nous avons pourtant besoin de ces voix pour aller de l’avant. Dans son discours, l’ambassadrice Valérie Berset Bircher a présenté le développement social comme le ciment de la société. Les ONG contribuent pour beaucoup à la cohésion sociale.

Et qu’est-ce qui est prévu maintenant ?
Le Sommet social mondial n’est qu’un début ou, comme l’a dit Annalena Baerbock: Doha n’est qu’une étape vers un avenir mondial équitable et égalitaire.

 

Photo de couverture: La délégation suisse au Sommet social mondial était dirigée par l’ambassadrice Valérie Berset Bircher du Secrétariat d’État à l’économie SECO (5e depuis la gauche) © Caritas Schweiz

Portrait von Peter Lack, Direktor von Caritas Schweiz
Peter Lack

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